Aujourd’hui, il existe de nombreux projets qui attachent un revenu à leur token. Que ce soit dans le domaine des stablecoins ou des RWA, la génération d’actifs est en augmentation. Souvent appelée yield-bearing assets, cette nouvelle classe de jetons pourrait devenir un standard.
LE STABLECOIN DE BLACKROCK
Après la reconnaissance tant attendue de la SEC, BlackRock, le plus gros gestionnaire de fonds au monde avec 9 000 milliards de dollars d’actifs sous gestion, a lancé son propre ETF BTC. Mais, ce qui est intéressant dans le cadre de cet article concerne une autre décision. Le 14 mars, le fonds est réapparu dans la presse suite au dépôt d’un document étonnant auprès de la SEC américaine.
Ce formulaire de type « Form D » parlait de la création d’un nouveau fonds nommé « BlackRock USD Institutional Liquidity » : ce fonds est dédié à la monnaie numérique, le Bitcoin. Ce nom est généralement abrégé en BUIDL, un initial bien connu des amateurs de cryptomonnaies. Rapidement, les rumeurs se multiplient sur les plateformes de médias sociaux afin de décrypter les plans du géant de la finance.
Un communiqué de presse mettra fin aux conjectures en expliquant l’objectif de ce fonds.
Le public a découvert que BUILD serait le premier fonds tokenisé sur une blockchain publique de BlackRock. Dans cette initiative, BlackRock a conclu un partenariat avec Securitize, connu pour la tokenisation d’actifs du monde réel, le RWA ou Real World Assets.
Et, ce n’est pas tout ! Ce nouveau fonds émet un stablecoin adossé au dollar américain. De plus, c’est un stablecoin porteur de rendement. Souvent nommé Yield Bearing Stablecoin, ce type de pièces permet au propriétaire de générer un revenu en détenant le token. Cet intérêt peut provenir de différentes origines. Concernant le fonds BUIDL, le rendement perçu vient des actifs dans lesquels le fonds investit. Par exemple, les obligations financières ou les contrats hypothécaires américains.
LA NOUVELLE MODE DU YIELD-BEARING ASSET
Le nouveau produit de BlackRock n’est pas la seule proposition de ce genre. Un certain nombre de protocoles ont adossé leurs jetons avec des intérêts natifs, les rendant plus attractifs. Cette tendance a notamment été utilisée dans le domaine des pièces stables. Voici quelques exemples.
ETHENA (ENA) ET SON USDE
En juillet 2023, était annoncé Ethena, ce protocole implémenté sur Ethereum et finalement lancé en décembre 2022 crée une nouvelle forme de stablecoins : l’USDe.
Contrairement à l’USDT ou à l’USDC, supportés par des réserves en dollars dans les banques, l’USDe est adossé à des crypto-monnaies. Un système déjà bien connu dans l’écosystème DeFi et qui est notamment utilisé par MakerDAO pour créer du DAI. Dans la pratique, un utilisateur bloque des crypto-monnaies en garantie et le protocole génère un stablecoin.
Néanmoins, Ethena se distingue d’autres plateformes en offrant un stablecoin qui ne dépend pas de capital sur-garanti. Pour le DAI, l’utilisateur doit introduire une quantité de crypto plus importante que le montant emprunté. Cela facilite la gestion des changements de prix de la garantie.
À l’inverse, Ethena utilise une approche originale en utilisant des positions appelées deltas neutres. Cela implique que dès qu’une certaine quantité de crypto-monnaies est déposée sur la plateforme, Ethena ouvre une position short (un pari à la baisse) de même montant. De cette façon, quelle que soit la direction prise par le cours de la crypto en question, la valeur du dépôt demeure stable. C’est ce fonctionnement qui garantit la stabilité et la viabilité de leur token.
La provenance des revenus
De plus, l’USD.e génère son propre rendement grâce à un mécanisme de jalonnement. Quand un utilisateur dépose des USDe, il reçoit des sUSDe. Le rendement de ce jeton provient de deux sources différentes.
D’abord, l’USDe est soutenu par le Liquid Staking Token (LST) de l’ETH. Le LST est une version tokenisée de l’ETH déposée en staking. Ces tokens produisent un rendement associé aux mécanismes de staking sur Ethereum. En conséquence, les sUSDe assurés par LST percevront des revenus associés à la preuve de participation.
Ensuite, la stratégie delta neutre du protocole permet de gagner des frais sur les positions placées sur les marchés permanents, gains grâce aux funding rates.
En résumé, les funding rates (ou taux de financement en français) sont des primes échangées entre les acheteurs et les vendeurs de contrats à terme. Elles sont régulièrement ajustées afin de faire correspondre le prix du contrat au marché au comptant (marché spot).
Les funding rates tendent à conserver un équilibre entre les prix des contrats à terme et les prix du marché spot dans le trading de contrats à terme. Cela contribue à favoriser la stabilité du marché.
Bien entendu, cela entraîne d’importantes fluctuations dans le taux de rendement du sUSDe. Le rendement annualisé a pu atteindre plus de 100 %, mais fluctue généralement entre 0 et 10 %.
L’USDA DE ANGLE
Le protocole Angle est un autre concurrent dans le monde des stablecoins générateurs de revenus. Angle a lancé USDa, un stablecoin produisant son propre rendement. Ce stablecoin repose sur des bons du Trésor américain et sur une version tokenisée de ces obligations : les T-bills.
Lorsqu’ils sont déposés pour le jalonnement, ces USDa vous permettent de tirer des rendements du rendement de l’actif sous-jacent (c’est-à-dire des bons du Trésor) ainsi que du marché des prêts de l’USDa. Ainsi, quand un utilisateur effectue des dépôts d’USDa dans le module de jalonnement, il obtient des stUSD qui produisent un revenu.
Les revenus viennent des actifs détenus par le protocole dans ses différents modules de frappe. La plateforme Angle récolte notamment les revenus des taux d’intérêt versés par les emprunteurs de l’USDA. Ces prêts peuvent être contractés via son module de prêt, qui crée les actifs spécifiques porteurs de rendement et conservés par le protocole.
Le protocole présente aussi un autre stablecoin, l’EURa, adossé à la valeur de l’euro.
UNE AUTRE COMPOSANTE DES ACTIFS DE RENDEMENT : LES LSD ET LST
L’autre côté des actifs de rendement LSD et LST
De toute évidence, les pièces stables ne sont pas le seul type de cryptomonnaies proposant des rendements natifs. Ainsi, lorsque Ethereum est passé au proof of stake ou preuve de participation, l’écosystème a assisté à une augmentation des protocoles de Liquid Staking ou jalonnement de liquidité.
Comme leur nom l’indique, ceux-ci sont conçus pour rendre le staking sur Ethereum plus liquide et accessible. À cette fin, les dépôts ETH mis en jeu sont tokenisés sous la forme de jetons appelés Liquid Staking Token (LST) ou Liquid Staking Dérivative (LSD).
Détenir ces jetons permet de gagner un bénéfice résultant de la sécurisation d’Ethereum. Parmi les plus grosses plateformes dans ce secteur, on trouve entre autres Lido ou RocketPool.
Le marché du LSD vaut aujourd’hui des dizaines de milliards de dollars. Le LST le plus représenté dans ce domaine est le stETH de Lido, suivi du cbETH de Coinbase et du wBETH de Binance.
Une évolution a été le protocole Eigenlayer et son concept de Restaking, qui ont fait apparaître de nouvelles plateformes de Liquid Restake.
Évidemment, les stablecoins ne sont pas la seule classe d’actifs à présenter des rendements natifs. Ainsi, en parallèle du passage au Proof of Stake sur Ethereum, nous avons vu se multiplier les protocoles de Liquid Staking. Une nouvelle fois, ces jetons permettent d’obtenir un rendement issu en partie du staking des ETH, mais également de la réutilisation de ces Ethers pour sécuriser d’autres blockchains.
LE YIELD-BEARING ET LE RWA (REAL WORLD ASSETS)
Les yield-bearing assets sont très présents dans les projets de RWA.
RealT est une plateforme de RWA comme beaucoup d’autres. Ce projet permet d’acheter des biens immobiliers tokenisés aux États-Unis et au Canada.
Exemple d’un bien tokenisé par RealT.
Sur RealT, chaque bien est divisé en une multitude de jetons. Chaque token représente une partie du bien immobilier ; de ce fait, il a droit aux revenus locatifs associés à celui-ci.
Dès lors, la totalité des tokens sont garantis par un actif tangible : un bien immobilier. Ces jetons produisent un revenu mensuel par le paiement du loyer. Dans ces conditions, la source du rendement du jeton est dérivée des revenus du RWA sous-jacent.
LE YIELD-BEARING EST-IL UN NOUVEAU MODÈLE ?
Ce nouveau type de jeton se répand progressivement dans l’écosystème. Les investisseurs apprécient ces tokens, car ils leur permettent directement de recevoir un rendement tout en étant exposé à l’éventuelle prise de valeur de l’actif sous-jacent, sauf si c’est un stablecoin.
Pour les stablecoins, ces revenus peuvent donner un sentiment de sécurité à l’utilisateur. De cette façon, il obtient un rendement qu’il ne peut avoir sur les pièces stables habituelles comme l’USDC ou l’USDT, sans nécessiter des tactiques, d’épargne ou d’emprunt complexes dans la DeFi.
Cependant, cette sécurité n’est pas garantie. Même si cela ne semble pas évident, ces tokens ont des risques associés. Qu’il s’agisse d’un échec de la stratégie de génération de gain ou d’un smart contract défectueux.
De ce fait, il est crucial de bien analyser la source du revenu ainsi que les audits de ces plateformes avant de prendre des positions sur ces tokens. On ne peut pas écarter un échec important comme celui de Terra Luna UST en 2022, par exemple.
De simple lecteur en 2018 à rédacteur, j’utilise l’écriture, pour partager mes connaissances à travers mes articles sur Blokulture. Mon souhait est d’informer sur l’univers de la blockchain, des cryptomonnaies, des NFT et de la DeFi. Persuadée que Bitcoin est une révolution, j’entends participer à la vulgarisation de l’écosystème crypto.